J’ai posé au bord du vide

En 2021, après quelques années à collaborer uniquement avec Eric [Monnier], je me suis sentie prête à rencontrer d’autres photographes. Ted a été l’un des premiers à me proposer une séance. J’ai accepté car son travail m’a plu dès les premiers instants à parcourir son compte Instagram et aussi car j’étais intriguée par l’argentique que je ne connaissais pas.

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Notre rencontre s’est faite en fin de journée. Nous sommes parti de Dijon en direction du lieu de la séance ce qui nous a laissé le temps de faire connaissance en voiture. Une fois arrivés, il a fallu marcher, prendre de la hauteur pour rejoindre le site que Ted avait en tête. Après quelques minutes sur un petit sentier à avancer entre les buissons, j’ai enfin découvert les lieux. Nous avons commencé par prendre quelques clichés depuis la plateforme sur laquelle nous nous trouvions, des photos en plan large et rapproché, assise sur des pierres. Puis j’ai montré à Ted l’avancée de roche qui nous faisait face depuis la plateforme.

« Je peux aller là-bas ? »

Ted m’a indiqué le chemin et je m’y suis dirigée sans attendre, avec une idée bien précise en tête. J’ai déposé mes baskets, mes chaussettes et mon jean au pied d’un buisson et j’ai avancé au milieu du promontoire. J’ai pris deux ou trois poses en attendant bien les « Ok » lointains de Ted pour me signifier que je pouvais proposer quelque chose de nouveau. J’ai avancé encore un peu, je me suis assise et me suis rapprochée du bord jusqu’à avoir les pieds dans le vide. J’ai vite enlevé mes lunettes et les ai glissé dans un des nombreux creux de la roche.

J’ai pris la pose, simplement assise le nez au vent.

Ted m’a dit de ne pas bouger, qu’il allait prendre plusieurs photos. J’ai donc attendu, satisfaite de prendre un risque. Je n’ai pas éprouvé un sentiment de liberté, ni de paix, ni de quoi que ce soit d’autre d’ailleurs. Au bout d’une minute peut-être deux, il m’a fait savoir qu’il avait terminé et que je pouvais revenir sur notre plateforme de départ. J’ai alors récupéré mes lunettes, je me suis éloignée doucement du bord pour me relever et récupérer mes affaires. À mon retour j’ai trouvé Ted avec un grand sourire, visiblement ravi de ce qu’il avait capturé. Il m’a fait part de sa surprise, de son enthousiasme quant aux photos que nous venions de créer ensemble. Nous avons continué la séance avec quelques clichés supplémentaires puis nous sommes redescendus jusqu’à la voiture pour rentrer à Dijon.

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Ce n’est que quelques semaines plus tard, le temps de développer la pellicule, que j’ai reçu les scans de notre séance. En les visionnant j’ai compris et ressenti la joie que Ted avait pu éprouver ce jour-là.

Depuis, nos séances se sont multipliées et mon attachement pour l’argentique n’a fait que grandir. J’aime particulièrement l’attente, la surprise mais aussi la plus grande confiance en l’autre que nécessite l’argentique. Ces clichés me rappellent également les constats photographiques des performances d’art contemporain qui m’ont immédiatement passionné durant mes études.

Un grand bravo et merci à Ted pour cette photo, cette première séance inoubliable et toutes celles qui ont succédé. Merci d’être cette personne intéressante et intéressée par ce que j’ai à raconter.